La dépouille du jeune Kebaïli Belhadj a été inhumée en présence d’une foule nombreuse, venue lui rendre un dernier hommage, alors que les commerces étaient toujours fermés, les écoliers retenus chez eux et que l’université a rejoint ce mouvement de protestation globale. Un calme précaire a régné hier au niveau de Ghardaïa. Les quartiers qui avaient été touchés l’avant-veille par de violents affrontements donnaient l’effet d’être de véritables villes mortes, nous ont indiqué des sources jointes par téléphone.

Arabes malékites et Mozabites ibadites, tout en s’échangeant diverses accusations dans des communiqués transmis à notre rédaction, ont tous deux décidé d’observer une grève quasi générale. Si les Malékites protestent contre le fait que les promesses qui leur avaient été faites de suspendre la mutation de près d’une vingtaine de policiers, les Ibadites, eux, se plaignent de l’«insécurité» dont ils se disent être les victimes. Toujours est-il que les commerces étaient fermés hier, alors que les écoliers ont continué à bouder les bancs de l’école et que l’université a décidé de se joindre à ce débrayage généralisé.

Tout cela intervient alors qu’un imposant dispositif sécuritaire a été déployé en vue de prévenir tout autre dérapage, et d’empêcher que de nouveaux affrontements ne se produisent. Les Arabes malékites ont également organisé un sit-in au niveau de l’artère principale de la ville de Guerrara, arborant des banderoles dans lesquelles ils ont exigé que les pouvoirs publics sursoient aux mutations qui ont touché 17 policiers ainsi que le chef de sûreté de daïra. Les protestataires indiquent à l’appui de leur mouvement qu’une promesse abondant dans ce sens leur avait été faite par le chef de daïra, lors d’une rencontre qu’ils ont eue avec lui la veille, lundi. Les autorités locales, qui ne s’expriment que de manière sporadique et parcimonieuse, ont-elles démenti le fait qu’elles aient formulé une pareille promesse, et ont même décidé hier de commencer à mettre en application ces décisions de mutation, ce qui risque, craint-on, d’envenimer encore plus la situation.

Parallèlement, comme le prouvent de nombreuses photos qui nous ont été transmises, les Mozabites ont décidé d’arborer l’emblème national au niveau de leurs demeures, mais aussi dessus leurs divers moyens de locomotion afin de prouver, à tous, qu’ils ne caressent aucune idée indépendantiste, comme tentent de le faire accroire certains cercles désirant, sans doute, récupérer ces incidents afin de porter atteinte à l’intégrité territoriale de l’Algérie. Face à ce calme précaire, nous apprenons que des tentatives de détruire le mur de clôture du cimetière de Baba-Essaâd en vue de se faufiler vers le quartier ouest des Mozabites ont été enregistrées. L’intervention des forces de l’ordre a permis d’empêcher cela.

Nous apprenons par ailleurs que 7 individus, présumés impliqués dans les échauffourées qu’a connu Ghardaïa, ont été écroués par le juge d’instruction prés le tribunal de Ghardaïa. 3 d’entre elles ont été inculpées pour « incendie volontaire et vol qualifié », deux autres pour « tentative d’incendie volontaire et destruction de biens publics ». Deux autres personnes, arrêtées en flagrant délit, dont une s’est rendue coupable de délit de fuite, ont été inculpées pour « attroupement armé sur la voie publique ». Un individu déféré également devant le juge d’instruction prés le tribunal de Ghardaïa pour les mêmes motifs d’attroupement et impliqué dans ces événements a bénéficié d’une citation directe le jour du procès.

Seize autres personnes impliquées dans les événements qui ont secoué la région de Ghardaïa depuis samedi dernier et placées en garde à vue, seront déférées incessamment devant les instances judiciaires compétentes. Nous y reviendrons avec plus de détails dans nos prochaines éditions…

Kamel Zaïdi

Source : Le Courrier d'Algérie